MOTU PROPRIO «Praestantia scripturae sacrae»
par S. Pie X
du 18 novembre 1907
Motu
Proprio de notre très Saint Père pie x, pape par la divine providence,
concernant les décisions de la commission pontificale préposée au
développement des études bibliques, ainsi que les censures et peines
portées contre ceux qui auront transgressé les prescriptions édictées
contre les erreurs des modernistes
« Notre prédécesseur,
d'immortelle mémoire, Léon XIII, après avoir, dans son Encyclique
Providentissimus Deus, parue le 18 novembre 1893, montré l'importance
et recommandé l'étude de l'Ecriture Sainte, traçait les règles qui
devaient présider à une étude sagement conduite des Livres sacrés. Il
proclamait leur origine divine contre les erreurs et les calomnies des
rationalistes et les défendait en même temps contre les opinions de
cette fausse science, connue sous le nom de haute critique : opinions
qui, comme l'écrivait très sagement le même pontife, ne sont
manifestement que des inventions du rationalisme péniblement tirées de
la philologie et des sciences similaires.
« Pour conjurer le
danger que la diffusion des idées téméraires et erronées rendait de
jour en jour plus menaçant, Notre même prédécesseur, par la Lettre
apostolique Vigilantiæ studiique memores, du 30 octobre 1902, institua
un Conseil pontifical ou Commission biblique, composé d'un certain
nombre de cardinaux de la Sainte Eglise romaine, illustres par leur
doctrine et leur prudence, auxquels furent adjoints, â titre de
consulteurs, un grand nombre d'ecclésiastiques choisis parmi les
savants théologiens et biblistes de différents pays et représentant les
méthodes et opinions exégétiques de diverses nuances. Le Pontife, en
effet, avait en vue un avantage très scientifique et approprié au temps
présent; il voulait que dans la Commission on pût proposer, expliquer
et discuter en toute liberté les opinions les plus diverses. Aux termes
mêmes de cette Lettre, les cardinaux ne se prononceraient pas avant
d'avoir pris en considération et pesé les arguments pour et contre.
Rien ne devrait être négligé de ce qui pourrait mettre en pleine
lumière l'état exact et véritable des questions bibliques proposées. Ce
n'est qu'après ces diverses étapes que l'on devrait soumettre les
conclusions à l'approbation du Souverain Pontife et ensuite les publier.
«
Après de patientes discussions et des délibérations très
consciencieuses, la Commission biblique pontificale a rendu plusieurs
décisions excellentes, très utiles au vrai progrès des études bibliques
et à leur bonne orientation.
« Et cependant, malgré cela, Nous
remarquons qu'il ne manque pas d'hommes qui, portés outre mesure vers
des opinions et des méthodes entachées de nouveautés pernicieuses, et
entraînés par le souci exagéré d'une soi-disant liberté - qui n'est en
réalité qu'une licence effrénée très préjudiciable aux sciences sacrées
et pleines de graves périls pour la pureté de la foi, - n'ont pas reçu
ou ne reçoivent pas avec l'obéissance qui leur est due les décisions
susdites, bien qu'approuvées par le Souverain Pontife.
« C'est
pourquoi Nous croyons qu'il faut déclarer et ordonner, comme Nous
déclarons présentement et ordonnons expressément, que tous sans
exception sont tenus en conscience d'obéir aux décisions doctrinales de
la Commission biblique pontificale, à celles qui ont été émises comme à
celles qui le seront, de la même manière qu'aux décrets des Sacrées
Congrégations approuvés par le Souverain Pontife ; que tous ceux qui,
en paroles ou par des écrits, attaqueront ces décisions, ne pourront
éviter la note de désobéissance ou de témérité et se chargeront la
conscience d'une faute grave, sans parler du scandale qu'ils peuvent
causer et des autres responsabilités qu'ils peuvent encourir devant
Dieu par les critiques téméraires et erronées dont s'accompagnent le
plus souvent des résistances de cette espèce.
« En outre,
voulant réprimer l'audace de jour en jour croissante de nombreux
modernistes - qui, par toutes sortes de sophismes et d'artifices,
s'efforcent de ruiner la valeur et l'efficacité non seulement du décret
Lamentabili sane exitu rendu, sur Notre ordre, le 3 juillet de l'année
courante, par la sainte Inquisition romaine et universelle, mais encore
de Notre Encyclique Pascendi dominici gregis, du 8 septembre de cette
même année, -
Nous réitérons et confirmons, de Notre
Autorité apostolique, tant le Décret le cette sainte Congrégation
suprême que Notre Encyclique, et nous ajoutons la peine
d'excommunication contre les contradicteurs.«
Nous
déclarons et décrétons que si quelqu'un - ce qu'à Dieu ne plaise -
avait assez de témérité pour défendre n'importe laquelle des
Propositions, des opinions et des doctrines réprouvées dans l'un ou
l'autre des documents mentionnés plus haut, il encourrait ipso facto la
censure portée par le chapitre Docentes, de la Constitution Apostolicæ
Sedis, laquelle censure est la première des excommunications latæ
sententiæ simplement réservées au Pontife romain. Et il
doit être entendu que cette excommunication ne supprime pas les peines
que peuvent encourir ceux qui se seront opposés en quelque manière aux
susdits documents en tant que propagateurs et fauteurs d'hérésies,
lorsque leurs propositions, opinions ou doctrines seront hérétiques, ce
qui, à la vérité, est arrivé plus d'une fois aux adversaires de ces
deux documents, surtout lorsqu'ils se sont faits les champions du
modernisme, c'est-à-dire du rendez-vous de toutes les hérésies.
«
Ces décisions prises, Nous recommandons de nouveau avec les plus vives
instances aux Ordinaires des diocèses et aux supérieurs des
Congrégations religieuses d'exercer la plus grande vigilance à l'égard
des professeurs, surtout dans les Séminaires. Que s'ils en trouvent qui
soient imbus des erreurs modernistes, avides de nouveautés malsaines ou
peu dociles aux prescriptions du Siège apostolique, quelque forme
qu'elles revêtent, qu'ils leur interdisent tout enseignement, et qu'ils
refusent de même l'accès des Ordres sacrés aux jeunes gens qui
prêteraient au moindre soupçon d'attachement aux doctrines condamnées
et aux nouveautés pernicieuses. Nous les exhortons en même temps à
surveiller sans relâche et avec zèle les livres et autres écrits - dont
le nombre croît démesurément - qui contiennent des opinions et des
tendances de même nature que celles qui ont été condamnées par
l'Encyclique et le Décret précités. Qu'ils veillent à ce que ces livres
disparaissent des librairies catholiques, et, à plus forte raison,
qu'ils les écartent des mains des étudiants et du clergé.
«
S'ils s'acquittent avec soin de ce devoir, ils favoriseront la
formation vraie et solide des esprits, œuvre qui doit être l'objet
principal de la Sollicitude des chefs religieux. Nous voulons et
ordonnons que toutes ces prescriptions soient tenues comme ratifiées et
confirmées par Notre autorité, nonobstant toutes choses contraires. »
Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 18 novembre de l'année 1907, de Notre pontificat la cinquième.
PIE X, PAPE.